Des faits alternatifs à la française
- André Touboul

- 8 janv. 2019
- 2 min de lecture
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On se gausse des faits alternatifs de Trump, nous avons les nôtres. Il n’est pas de jour où l’on n’entende répéter comme un mantra que la volonté du peuple français exprimée lors du référendum de 2005 a été trahie, contournée par un vote parlementaire. En quelque sorte, les représentants contre le peuple.
Cette rengaine, entonnée par les meilleurs esprits, est néanmoins une falsification des faits. Les Français ont en 2005, rejeté la Constitution européenne, et nous n’en avons pas. Ils n’ont pas voté pour la sortie de l’Europe, et nous y sommes resté.
L’Europe a continué à fonctionner a minima, par des traités mal ficelés, donc cahin-caha, impuissante à régler les questions essentielles auxquelles elle était confrontée. Il y a néanmoins un point sur lequel la voix du peuple Français n’a pas été entendue, c’est celui de l’élargissement. L'un des arguments de ceux qui refusaient la Constitution était la menace d’élargissement à la Turquie qui a continué à planer de nombreuses années et n'est pas totalement écartée. Ce danger n’est pas étranger au rejet de l’Europe apparaissant non plus comme une maison commune, mais comme un auvent ouvert à tous les courants d'air. De fait, le mouvement d’élargissement existait avant 2005, il n’est poursuivi à l’est de l’Europe, et, d’évidence, il est à l’origine du Brexit. Cependant, ce n'est jamais cet aspect qui est invoqué, et pour cause, celui-ci n’était pas explicitement présent dans la consultation de 2005.
En revanche, s’il y a eu une violation effective de la volonté populaire, c’est certainement pour le référendum relatif au projet de Notre Dame des Landes. Après avoir posé la question : voulez-vous oui ou non l’aéroport, et obtenu la réponse très majoritaire : oui, nous le voulons, le Gouvernement a décidé sans mollir : puisqu’il en est ainsi nous y renonçons.
Cette trahison manifeste n’est jamais évoquée, et quand on a l’outrecuidance de le faire, il se trouve toujours quelqu’un qui rétorque que le corps électoral était mal choisi, oubliant que c’est le Gouvernement qui l’avait lui-même défini.
Cette degonflada fut passée sous silence., car il était alors de bon ton de chanter les louanges de ceux qui avaient eu le courage de réformer là où depuis des lustres aucun de leurs prédécesseurs ne l’avaient eu. On a eu depuis la démonstration que devant la violence des zadistes ou de la rue en gilet jaune, nos chevaliers Bayard, sans peur et sans reproche se dégonflent comme des baudruches percées.
Du temps de l'URSS, on réécrivait l'histoire pour la faire cadrer avec le matérialisme marxiste. De nos jours, tout s'accélère et l'on falsifie le présent, sans scrupule aucun, au gré des arrières-pensées politiques du moment.
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