Much ado about nothing
- André Touboul

- 19 janv. 2019
- 2 min de lecture

Nos amis Anglais sont-ils devenus fous ou nous jouent-ils une comédie destinée à nous rouler dans la farine ?
Les Britanniques sont persuadés qu’ils sont les meilleurs dans l’art de la négociation. Ils ont inventé d’ailleurs un discours qui leur permet de gagner à tous les coups : le win/win, soit gagnant/gagnant. Dans l’affaire du Brexit il semble qu’ils en aient mis en œuvre une variante le loose/loose, soit « tout le monde y perd ».
Pour éviter d’être submergés par des plombiers polonais ou tchèque à moins que ce ne soit slovaques, ils vont larguer les amarres. Et prendre le large. Tant pis pour les échanges de services et commerciaux. Le commerce reprendra. Sauf que la Grande Bretagne subira les règles édictées par les européens du continent. Ils devront respecter toutes les normes auxquelles ils avaient voulu échapper, mais cette fois sans pouvoir influer sur leur contenu. Pour des gens qui voulaient maîtriser leur destin, piètre résultat.
Les Anglais croyaient avoir gagné la guerre contre les Allemands au siècle dernier, ils ont perdu la paix dans le nôtre.

Ils avaient cru faire exploser l’Europe, c’est le Royaume Uni qui risque de se désunir.
Étrangement, ils ont investi pour sortir un Premier ministre qui souhaitait rester dans l’Union. Doit-on parler d’une conduite d’échec ?
Placés devant la perspective d’un désastre, certains prônent un nouveau référendum. Theresa May le rejette, et elle a raison. Il n’est pas pensable aujourd’hui que l’Angleterre mange son chapeau et revienne la queue basse dans le rang des européens. Sa dignité, sa fierté nationale ne le permettent pas.
Alors, ils devront boire le calice jusqu’à la lie ? Peut-être pas.
Que le Brexit soit soft ou hard, les peuples ont depuis des siècles des relations qui ne vont pas cesser. Le Brexit n’est pas la guerre, ni le blocus. Il faudra s’organiser autrement. Et à cet égard, nos amis d’Outre-Manche nous rendent service. Ils nous offrent l’occasion de tout remettre à plat.
Au bout du jour, les européens inventeront un nouveau statut d’Europe à la carte. D’un côté le noyau dur, celui de l’Euro de plus en plus coordonné, avec une politique économique et des fiscalités convergentes, et un rapprochement des systèmes sociaux ; de l’autre des satellites dont le Royaume Uni, gardant leur monnaie locale et négociant des accords réciproquement profitables.
De fait, le Brexit peut être une chance inespérée pour la Zone Euro, enfin libérée des corps étrangers non-euro-compatibles, de serrer les rangs, non pour punir la Grande Bretagne car ce serait une sottise d’oublier les intérêts communs économiques et culturels qui nous unissent, mais pour tirer les conséquences d’une union monétaire.
Il est, en effet, très difficile de s’harmoniser dans un club où tout le monde ne joue pas avec les mêmes cartes, ce qui est le cas quand les monnaies sont, comme jusqu’ici, disparates.
Alors comme disait Shakespeare : Beaucoup de bruit pour rien ?
Non, ce serait plutôt : un mal pour, en fin de compte, un bien, et pour rester shakespearien : « tout est bien qui finit bien ».

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