Le côté obscur de la France
- André Touboul

- 31 janv. 2019
- 3 min de lecture

Il faut cesser de se mentir. Ceux qui revêtent des gilets jaunes, récupérés dans le coffre de leur bagnole sont loin de représenter le peuple de France.
Parmi eux, ni noirs, ni juifs, ni arabes, ni immigrés. Mais ce n’est pas parce qu’il n’y a pas de minorités qu’ils sont la majorité.
Ils se croient représentatifs d’une majorité sacrifiée parce qu’ils clament qu’il y en a plus que l’on fait plus pour les minorités que pour eux. Ils s’estiment en fait supérieurs à tous ces intrus qui viennent manger le pain et voler les allocations des vrais Français.
Bas les masques, les Gilets jaunes ne sont rien d’autre que des « petits blancs ». Petits blancs, Aymeric Patricot en a fait le titre d’un livre en 2013, mais ce terme existait bien avant. Du temps des colonies c’étaient ceux dont la supériorité raciale sur les indigènes était la seule valeur.
Ce sont aujourd’hui les électeurs de Trump ; le fameux whitelash, contraction de white et backlash, le retour de bâton des blancs. Réaction des américains blancs racistes contre les droits des minorités colorées. On explique leur hostilité par des raisons économiques, mais tout n’est pas économie, sauf à se cantonner à une analyse marxiste. Il y a aussi l’erreur magistrale des élites blanches qui pour se dédouaner de la culpabilité de leur propre sectarisme ont inventé le politiquement correct qui va au-delà du raisonnable, par retour de balancier. Ainsi l’idée de la discrimination positive que ce soit pour les minorités ou les femmes, a fait pour la démocratie américaine plus de ravages qu’accompli de progrès.
En France, ils se nomment Gilets jaunes qui se disent victimes d’une injustice. Mais en quoi ? Le pays a poussé la redistribution à son paroxysme. Le problème c’est qu’à leurs yeux il y en a plus pour les autres que pour eux. On en fait plus pour les riches, les immigrés que pour les Français de souche. Cette appellation incontrôlée donne le droit de honnir les élites cosmopolites, et mépriser toutes sortes de métèques, sans oublier pour faire bon poids de pratiquer un antisémitisme viscéral.
Munis de ce passeport pour la misère morale, ils s’instituent « majorité silencieuse », mais ils ne sont ni silencieux, car on les entend pester et brailler plus souvent qu’à leur tour ; ni majoritaires, fort heureusement, car ils ne représentent que le côté obscur de la France et ne préconisent en politique que des stupidités. Ils n’ont rien en commun avec la France humaniste des Lumières.
On est loin du ras-le-bol de la fiscalité sur les carburants qui ne pouvait qu’être partagé. Mais sur la foi de sondages interprétés de travers, les médias se sont laissés prendre et ont développé un discours misérabiliste, alors que ces gens-là ne sont pas des pauvres. Leurs complaintes le montrent. Ils parlent de leur difficulté à boucler leurs fins de mois, ils répètent qu’ils travaillent et qu’il ne reste rien pour leurs loisirs. Ils ont une voiture. Ils disent être au-dessus du seuil des aides publiques, du moins le croient-ils, car ils en bénéficient en réalité du fait qu’ils jouissent des services publics alors qu’ils ne paient pas d’impôt sur le revenu et vont être exonérés de taxe d’habitation.
Ces « prétendus silencieux » qui se prennent pour l’eau qui dort refusent le débat, ils préfèrent occuper la rue.
On a vanté la fraternité des ronds-points où l’on brûle des palettes et chacun apporte des saucisses pour un barbecue permanent. Ce rite de rapprochement ne fait que traduire une carence de reconnaissance sociale de ceux qui se sentent isolés.
Ils en veulent à l’Etat qui les prend de haut, les néglige ; ils insultent ses représentants, les élus et évidement le Président d’une République qui ne les aime pas. On peut gloser sur les élites qui devraient cesser de les mépriser, mais ces « braves gens » ne sont pas aimables. Ils ne sont en vérité victimes que d’eux-mêmes. Ce qui leur fait défaut, c’est le voisinage, le lien social.
Et c’est bien normal car pour eux l’étranger commence sur le palier. La vie, le monde extérieur entre chez eux par la télévision. Ils n’y ont pas accès. Il sort beaucoup de chose d’un écran, on n’y entre pas. S’il y a une vraie détresse du Gilet jaune, c’est une misère morale. Alors, après les soins d’urgence pour lesquels il faut admettre que Macron fait le boulot sur le terrain, il faudra un traitement psychiatrique de long terme qui passe certes par une réconciliation des élites avec la France, son histoire, et sa culture, mais aussi un effort des laissés pour compte eux-mêmes afin de compter autrement que par leur pouvoir de nuisance… et retrouver une réelle utilité sociale.
En tout cas, de grâce, il faut cesser de présenter ces cas pathologiques que sont les Gilets jaunes, comme l’essence du peuple français.
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