La troisième Guerre Mondiale a commencé
- André Touboul

- 21 févr. 2019
- 3 min de lecture

Les Russes ont un talent inégalé pour l’action psychologique. Au 20ème siècle ils ont exploité l’idéologie communiste pour asseoir leur empire, asservir leurs satellites, empêcher leur concurrent américain de tirer les profits d’une puissance économique sans précédent.
Au 21ème siècle, ils ont changé de côté de l’échiquier. Ils on abandonné les pions blancs pour jouer des noirs. Fini le marxisme-léninisme, vive le populisme. De la même manière qu’ils avaient vendu leur potage collectiviste au Tiers Monde et même dans la plupart des pays de la vieille Europe, ils s’emploient à cultiver les fruits du ressentiment des classes moyennes déçues par la mondialisation.
Leur influence s’étend désormais jusqu’aux États-Unis qu’ils n’avaient pu pénétrer avec leurs habits de rouges. Jamais l’on n’avait soupçonné un Président US d’être sous influence russe. Les enquêtes sont ouvertes pour savoir jusqu’à quel point Donald Trump l’est ou l’a été.
Dans sa stratégie de démolition, Moscou finance le Brexit et pousse à la roue par des cyber manigances.
On ne rêve pas, ce sont les mêmes qui vantaient l’homme nouveau du socialisme triomphant qui agitent les plus bas instincts du peuple. Leur exploit est d’autant plus remarquable qu’ils arrivent à coup de complotisme, d’intox et de fake news relayées par les automates sur les réseaux sociaux et Russia Today, à introduire le désordre social dans un pays comme la France dont le niveau de redistribution est le plus haut qui soit.
La troisième guerre mondiale a commencé, c’est Moscou qui l’a initiée. La raison de cette agressivité russe est vieille comme le monde, elle s’appelle en allemand « lebensraum ». Les guerres ont toujours pour origine des revendications territoriales. L’espace vital mérite que l’on sacrifie la vie des hommes, et parfois des peuples entiers. Les prétextes sont variés. Parmi eux, la réunion de populations qui forment une nation est un des moteurs les plus puissants.
On ne cesse de dénoncer l’ingérence de la Russie dans les affaires électorales des démocraties, de souligner l’interventionnisme russe au Moyen Orient, ses coups de force d’abord en Géorgie, puis avec l’annexion de la Crimée, et en dernier lieu la déstabilisation de l’Ukraine. On évoque parfois sans trop y prêter crédit, le spectre de l’URSS. On parle de cyber-conflits où les russes seraient virtuoses, comme ils le sont au jeu d’échec, et dans les opérations de manipulation psychologique. Les pays baltes réfugiés au sein de l’Europe ne cessent de prévenir du danger de l’impérialisme russe.
Mais a-t-on posé la question : pourquoi alors qu’il n’y a plus de fossé idéologique entre l’Est et l’Ouest, et qu’il est de l’intérêt évident de la Russie, convertie au capitalisme privé, de commercer avec l’Occident, tous ses efforts semblent tournés vers un affaiblissement des Etats-Unis, et une dislocation de l’Europe ?
On lit que le Brexit aurait été favorisé par des financements russes. Que les populismes en Italie et en France peuvent compter sur l’aide du Kremlin. Alors que le PIB de la Russie est inférieur à celui de l’Italie (1,5 M de $, contre 1,9 M de $), on pourrait penser qu’il existe de meilleures emplois pour les richesses de Moscou.
Il n’en est rien et la réponse est simple, son nom est « Ukraine ». La faute politique majeure de l´Union Européenne saisie par sa frénésie d’élargissement dont elle ne comprend pas qu’elle est agressive à l’extérieur tout autant que délétère en interne, est de soutenir les dirigeants ukrainiens contre la volonté russe de réunification.
Loin de constituer une renaissance de l’impérialisme soviétique, la poussée vers l’Ukraine, dont les gouvernements sont un exemple de corruption plus que de démocratie, n’est qu’un mouvement de revendication historique. L’Ukraine et la Russie ont une histoire médiévale commune. Kiev est considérée comme le berceau de la civilisation slave orientale. Du point de vue linguistique le russe, le biélorusse et l’ukrainien ont une même origine.
Depuis le 17ème siècle l’Ukraine a fait partie de l’empire russe, plus ou moins totalement. Les tentatives d’indépendance ont toutes échoué, jusqu’à la fin de l’Union soviétique. Le rapprochement avec l’OTAN et l’Union Européenne est vécu en Russie comme une spoliation. C’est en tout cas la justification de la politique russe anti-européenne.
Se réconcilier avec la Russie supposerait une position claire vis à vis de l’Ukraine faisant savoir qu’il est hors de question qu’elle intègre jamais l’Europe des 27 et/ou l’OTAN. Et que l’on renonce à contester l’annexion de la Crimée par des sanctions qui ne pénalisent que nous.
Si l’on refuse cette politique réaliste, il n’est pas exclu que de cyber-conflit en réarmement classique, l’Europe soit placée un jour prochain devant le choix cornélien d’un affrontement avec la Russie ou d’une déroute diplomatique majeure qui marquerait la reconstitution de l’empire soviétique.
La politique anti-européenne des Etats-Unis et leur réplique molle lors de l’affaire de Crimée, montre que le parapluie américain ne vaut que par beau temps. La Pologne qui vit aux crochets de l’Union Européenne, et dont une partie du territoire est susceptible de revendication russe, se fait des illusions en comptant sur la protection américaine.
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