Nous avons l’élite la plus menteuse du monde

Il existe en France un hiatus entre l’élite et l’idéologie qu’elle professe.

Le maître mot de tout discours, celui qui met fin à toute argumentation, est dans notre pays l’égalité. Les inégalités, voilà l’ennemi !

Bien entendu, en apparence, l’élite dirigeante et bien-pensante de la douce France professe ce culte de l’égalité. Mais cela n’est qu’hypocrisie. En effet, aucune élite ne peut sans se contredire dans son essence se déclarer pour l’égalité. L’égalité des droits est déjà difficile à admettre, car que serait l’élite sans ses privilèges ; l’égalité des chances ne se conçoit guère, puisqu'il est illusoire d'exiger que les meilleurs renoncent à faire le nid de leur progéniture ; quant à l’égalité réelle, qui est celle dont on badigeonne le bon peuple, c’est une vaste utopie. On se souvient qu’un Ministère à l’égalité réelle fut néanmoins institué sous le quinquennat Hollande, il est vrai par un Président qui trompait le peuple de France avec autant de cynisme que ses compagnes du moment.

Dans une société qui se veut sincèrement et totalement égalitaire, on devrait s’interdire de former des individus pour les rendre meilleurs que d’autres, plus aptes à certaines tâches comme celle de gouverner. On devrait aussi tout faire pour réduire les inégalités, en interdisant au plus aptes d’exercer un pouvoir qui les rendrait supérieurs aux autres et serait la source ou l’occasion de disposer d’avantages particuliers. Cette vision est évidement absurde. Les nécessités du réel font que l’on trouve toujours dans toute société un mécanisme de sélection qui permet de désigner ceux qui vont conduire les affaires publiques, non pas par tirage au sort comme cela devait être dans un monde où tous les citoyens sont égaux, mais par élection, cooptation, concours… quand ce n’est pas naissance, fortune ou force physique.

Ainsi le discours public n’est qu’un énorme mensonge. C’est d’ailleurs cette hypocrisie qui est à l’origine du malaise français. Pour dissiper ce sentiment diffus des citoyens d’être en permanence floués, il serait nécessaire que l’élite s’assume, en même temps qu’elle assume ses responsabilités. Au lieu de cette garantie de franchise, notre élite de pouvoir, mais aussi de bon nombre d'intellectuels préfèrent le refuge du mensonge. Si l'on demandait à nos élites s'ils s'appliquent à eux-mêmes les nobles principes égalitaires qu'il prétendent servir, nul doute que l'on se découvrirait environné d'une palanquée de Pinocchio, au nez démesurément long.