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Intégration ou désintégration, il faut lire le rapport Tuot sur l’intégration

  • Photo du rédacteur: André Touboul
    André Touboul
  • 13 mai 2019
  • 4 min de lecture

Il est intitulé « La grande nation pour une société inclusive »


Il s’agit d’un travail livré en 2013 par Thierry Tuot, Conseiller d’Etat sur lettre de mission du Premier Ministre Jean-Marc Ayrault.


Depuis le dépôt de ce rapport on a surtout entendu appliquer le terme « inclusive » à l’écriture, avec l’insuccès que l’on sait. La seule conquête notable dans ce domaine a été l’apparition du « celles et ceux », incontournable, qui n’est au fond qu’une redondance et fait suite au traditionnel « Mesdames et Messieurs », qui au regard du respect de la vie privée a été amputé de son « Mesdemoiselles », et à rebours de son objet insiste sur une séparation des sexes qui n'a pas toujours lieu d'être. Tel n’était pas l’objet du rapport du Conseiller d’Etat Tuot, son rédacteur qui planchait sur la délicate question de l’intégration des migrants.


Rédigé dans une langue à tiroir spécifique de la Haute Administration française, où les phrases interminables comptent quatre idées différentes à chaque ligne et font disparaître leur sens précis sous d’insaisissables généralités, le rapport est bourrelé de bons sentiments décousus par quelques constats réalistes de sorte que l’on ne voit pas où le rédacteur veut en venir.


Ce travail ne présente aucune cohérence, ni ne propose de plan d’action nouveau, cela n’est pas surprenant car le problème de l’intégration est un casse-tête qui ne comporte de choix qu’entre de mauvaises solutions. En la matière, l’Etat est piètre cuisinier, sa sauce ne prend pas, car il ne peut intervenir sans violer les consciences et les libertés individuelles, et l’adhésion à une patrie ne se commande pas.


Il est très important, cependant d’y porter attention, car nombre de thèmes de ce rapport ont été préemptés par Emmanuel Macron.


On se contentera ici d’en relever deux éléments qui n’ont pas dû plaire à Jean-Marc Ayrault.


. « On se trompe en croyant que, comme aux belles heures des années cinquante, l’État peut demander à sa technocratie d’élite des solutions techniques parfaites. Il peut seulement proposer à la société de se mettre en mouvement, et s’affirmer le garant que personne ne sera laissé pour compte ou écrasé au passage»Dans la conclusion où comme souvent on découvre le fond de la pensée de l'auteur qu'il s'est ingénié à dissimuler dans le corps du texte, on peut lire : Il est difficile de ne pas approuver ce principe, que l’on retrouve dans la pensée du Président Macron.


On relèvera aussi, mais dans le chapitre consacré à la culture : « Deux impasses ont été empruntées par les politiques en la matière. La première est la voie des cultures d’origine, du multiculturalisme et de la reconnaissance institutionnalisée de la diversité. L’État, les pouvoirs publics, n’ont, pourtant, aucune légitimité pour reconnaître ou définir les “bonnes” cultures. Elles sont des faits sociaux modelés par l’histoire. Aucune ne doit être niée ou minorée. Il n’y a évidemment pas de culture inférieure ou supérieure. Mais de cette laïcité culturelle bien comprise découle, aussi, qu’il n’appartient en rien à l’État d’enseigner ou diffuser les cultures “d’origine” ; ne pas les humilier, refuser de les stigmatiser, encourager chacun à les assumer ou les revendiquer ne peut ni ne doit conduire à les enseigner ou les diffuser en tant que telles (et, à ce titre, ce qui demeure d’enseignements en langues et cultures d’origine dans le cadre de conventions internationales devrait, en liaison avec nos partenaires, évoluer radicalement)».


La seconde impasse est pour Thierry Tuot d’ordre social, il propose de remplacer la culture communautaire par la mixité culturelle. Le slam à Neuilly et les Bentley en double file devant la Maison des Jeunes de Montfermeil.


Si le premier principe énoncé par le Conseiller Tuot à propos de la culture est clair, fort et susceptible de mise en œuvre dans une conception objective de la laïcité, le second est une vue de l’esprit. Celle d’un esthète prêt à ingurgiter toutes les formes d’art. La réalité sociale est toute différente. L’appétit artistique est profondément lié au mode de vie. On peut goûter le folklore, mais c’est toujours un voyage en terre étrangère.


Le problème éludé ici est celui de la mixité sociale. Celle-ci ne se décrète pas. Certes on peut et l’on doit, par les politiques publiques, favoriser tout ce qui rapproche, ce qui relie, tout ce qui, comme l’on dit, « fait lien », et tient une société ensemble. Mais il ne faut pas perdre de vue que la cohésion sociale et au plus haut niveau nationale n’existe que par le miracle d’un projet commun transcendant les diversités.


La seule intégration qui vaille n’est pas celle qui rend identique, mais fait que l’on regarde ensemble dans la même direction. Et c’est cela que l’on peut et doit demander aux nouveaux arrivants, : tout en restant eux-mêmes, ils se doivent d'aspirer au même avenir que la majorité du peuple qui les accueille. Cet aspect n'est pas apparent dans le rapport Tuot. Il faut néanmoins souligner qu’il constitue une rupture avec la doctrine communautariste qui jusqu’ici a prévalu dans la Haute Administration française.


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