En bonne compagnie, avec Giesbert et Julliard
- André Touboul

- 11 août 2019
- 2 min de lecture

Dans ces temps où la stupidité ambiante fait douter de son propre bon sens, il est réconfortant de trouver des paroles justes chez certains qui, dans le brouhaha médiatique, détonent par leur lucidité.
Il faut en citer deux Franz-Olivier Giesbert et Jacques Julliard.
L’un et l’autre ont débuté leur itinéraire sur la gauche du paysage intellectuel français. Tous deux sont passés par le Nouvel Observateur, et l’un a dirigé Le Figaro, l’autre y écrit aujourd’hui. Cela ne veut pas dire qu’ils ont renié leurs idées forces, mais simplement qu’ils sont des esprits libres refusant la dictature du conformisme lorsqu’il est frappé de l’idiotie que Lénine qualifiait d’utile. En d’autres mots, nos deux exemples, car il sont dignes d’être pris comme tels, se sont exemptés de l’aveuglement de ceux qui en agitant des grands principes qu’ils ne maîtrisent pas ne se rendent pas compte qu’ils scient la branche sur laquelle ils sont assis : notre société de liberté qui est celle des gens paisibles et non pas des casseurs braillards.
Il ne s’agit pas pour Julliard de prôner l’ordre pour l’ordre, ni de suivre Goethe quand il disait préférer une injustice à un désordre. Il invite simplement à faire le tri entre les revendications et les imprécations. Les unes méritent d’être entendues les autres ne conduisent qu’à la violence destructrice. Avec pertinence, Julliard observe que l’opposition peuple/élite est sur la voie de faire faillite en France, ce n’est pas le peuple qui, chez nous, bouscule l’élite mais : « En France, voire en Allemagne, son éclipse est moins due à la disparition de son électorat traditionnel qu’à son affaissement intellectuel, c’est-à-dire à son incapacité à analyser le monde réel à la lumière de ses valeurs les plus éprouvées : la nation, le mérite, la fonction intégratrice de l’École, la laïcité, le rôle émancipateur du travail, autrement dit des institutions républicaines. ». Enfin quelqu'un qui comprend que critiquer l'élite n'est pas faire du populisme, mais lui tendre un miroir pour qu'elle s'amende.
Sur la république des coupeurs de têtes de l’ordre moral à la Mediapart, Giesbert et Julliard se rejoignent. Ils refusent avec vigueur d’être dupes de ces donneurs de leçons d’une morale qu’étrangement ils ne s’appliquent pas à eux-mêmes. « Et ici, le principal responsable, ce sont les médias ; c’est le peuple-opinion qui se prend pour le peuple souverain », écrit Julliard. Giesbert laisse tomber le couperet en titrant : « Mediapart, roi de la pantalonnade », de quoi hystériser le sieur Plenel qui se prend pour un professeur de philosophie morale alors que la seule activité qu’il exerce avec talent est celle d’éboueur.
Hommage donc à Giesbert et Julliard qui ont le courage de nager à contre-courant, et néanmoins dans le bon sens. Ils ont le courage et la raison de pourfendre les faux-monnayeurs. On enseignait jadis en économie que "la mauvaise monnaie chasse la bonne", il en est hélas souvent ainsi dans le domaine des idées. Les fausses se propagent plus vite que les vraies, on dit souvent que la vérité finit toujours par triompher, mais dans quel état, et au bout de combien de temps.
Commentaires