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La laïcité des ronds-de-cuir, n’est pas légitime

  • Photo du rédacteur: André Touboul
    André Touboul
  • 19 oct. 2019
  • 3 min de lecture

La stratégie des fondamentalistes de Daesh est de renvoyer à leur musulmanité, c’est à dire leur religion supposée en raison de leur ethnie, des Français qui n’en demandaient pas tant. Et de les y enfermer qu’ils le veuillent ou non.


Ils jouent sur du velours. Toute minorité visible se sent vue comme telle. Et il suffit donc pour séparer quelques-uns de la communauté nationale de les rendre ostensibles. Aux Etats-Unis, cette société idéalisée et promise par notre élite d’Etat, on a vanté le melting pot, mais, dans les faits l’on y parle aujourd’hui de salad bowl, pour souligner que les communautés ne se mélangent pas ; et l’on remarque que chaque minorité s'estime discriminée par la majorité, et exige, à rebours, une discrimination positive, et pour certains des quotas. Ce n’est plus de la mixité sociale, mais un enfermement dans des catégories définitives, déterminées par la naissance.L'antichambre de l'enfer.


Les religions qui toutes parlent à l’universel, portent en elles un principe totalitaire fort de réunion/séparation. Elles ont ainsi une capacité à dresser les groupes les uns contre les autres. Karl Marx comparait la religion à l’opium. Certes, l’effet analgésique des croyances transcendantales et les rites qui les accompagnent est incontestable, mais la religion est aussi un puissant moteur d’action. L’opium calme, on peut aussi dire en polémiquant qu’il abrutit ; agissant très différemment, la religion exaspère les agressivités. On racontera ce que l’on veut sur les religions de paix, il n’est de pires et inhumaines guerres que celles de religion dans lesquelles on tue les gens pour leur apprendre à vivre. C'est là de la religion mal comprise, dit-on, car l'arrière plan de toute religion est humaniste. Sans doute, mais si seule l'une des deux faces de la même médaille se montre, on finit par se demander si l'autre existe.


Pour échapper à cette malédiction, à l’heure où les groupes religieux divers coexistent dans bien des pays, et en particulier le nôtre, il est impératif de fixer une limite à chaque religion. Car, par nature, la religion a vocation à occuper tout l’esprit, et par ses rites à envahir toutes les activités. On peut appeler « laïcité » la fixation de ces bornes.


Il ne s’agit pas, par respect de ce concept, d'interdire ou de nier le fait religieux, mais d'exiger que l'on renoncer à changer la société en son nom. Non par l’abstention de prosélytisme, comme le dit maladroitement le Conseil d’Etat. La registre de la laïcité est politique et non spirituel.


Ce n’est pas non plus, comme le fait le même cénacle poussiéreux de hauts fonctionnaires, de s’abstenir de troubler l’ordre public. En effet, les esprits peuvent être choqués sans que cela se traduise par un désordre physique. On oublie un mouvement d’humeur exprimé par le geste, les atteintes inexprimées provoqués par des signaux faibles font bien plus de dégâts.


Pour définir ce qui est ou peut devenir l’usage social, c’est folie de s’en remettre à des bureaucrates. Pour cette tâche seuls les élus sont légitimes. C’est à eux qu’il incombe de délimiter les contours de la laïcité. Dans ce domaine, comme dans d’autres, ils s’en sont, pour notre malheur, défaussés sur des ronds-de-cuir.


Sur un sujet de cette nature, on ne peut rien attendre d’Emmanuel Macron. Il n’a pas été élu pour cela, mais surtout on ne peut s’en remettre à un seul homme du soin de décider de cette question fondamentale pour tous. Seuls des représentants élus, assez nombreux pour être représentatifs des diverses composantes de la société, seraient légitimes. Hélas, nos politiques sont dans un tel état de discrédit qu’il est dans l'immédiat illusoire d’attendre d’eux une vérité opérationnelle.

 
 
 

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