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L’improbable Monsieur Delevoye, Superman rattrapé par le principe de Peter

  • Photo du rédacteur: André Touboul
    André Touboul
  • 28 déc. 2019
  • 3 min de lecture



Le plus intriguant des événements de ces derniers jours sur l’affaire des retraites dont le jeu de rôle n’a rien de stupéfiant, est sans conteste l’explosion en vol de Jean-Paul Delevoye.


Confier la réforme des retraites à une personnalité aussi capée que Jean-Paul Delevoye, 10 ans Président de l’association des maires de France et sénateur, ministre sous Chirac, 7 ans médiateur de la République, Président du Conseil Économique, Environnemental et Social, etc… était à coup sûr un excellent choix. Vieux de la vieille, il n’était pas du monde nouveau, mais pour le dialogue social on ne pouvait rêver mieux. Même son physique de père noble jouait en sa faveur.


Patatras ! Le voilà qui se saborde en remplissant un formulaire à la portée d’un gamin de CM2. Étourderie ? Personne ne peut le croire, ce serait terrorisant de la part d’un de ceux qui ont la charge de notre avenir. Ceux qui pratiquent la psychanalyse de comptoir parleront de conduite d’échec.


La réalité est plus simple. Elle s’appelle l’ivresse des sommets, qui saisit les personnages qui parviennent au point culminant de leur carrière, comparable à celle des profondeurs. Cette loi s’adosse au principe de Peter, dont elle est l’une des conséquences.


Le principe de Peter (appelé aussi « syndrome de la promotion Focus ») est une loi empirique relative aux organisations hiérarchiques proposée par Laurence J. Peter et Raymond Hull en 1970. Selon ce principe, « dans une hiérarchie, tout employé a tendance à s'élever à son niveau d'incompétence », avec pour corollaire que « avec le temps, tout poste sera occupé par un employé incapable d'en assumer la responsabilité ». Ainsi, peut-on comprendre que soit l’intéressé se réfugie dans l’inaction, soit, s’il est obligé d’agir et projeté en pleine lumière, il dévisse et se jette dans le vide.L’intéressé est d’autant plus enclin à abandonner toute prudence qu’il éprouve un sentiment d’invulnérabilité, assorti d’un total mépris pour ceux qu’il va désormais dominer.


Se prenant pour un super-héros, Jean-Paul Delevoye ne touche plus terre. A-t-on vu Superman remplir un formulaire pour lister ses conflits d’intérêts ?


L'affaire Delevoye présente un autre aspect révélateur des mœurs de la République des bureaucrates.


On sait maintenant que Matignon était informé des problèmes que dès octobre 2017 posait la situation du Haut Commissaire. Étrangement, alors que celui-ci se singularise par ses idées personnelles sur la version finale de la réforme, tant par rapport à la position du Président qu'à l'égard de celle différente du Premier Ministre, le dossier entre les mains du Secrétariat Général du Gouvernement, fuite dans la Presse. Delevoye devenait gênant. Macron, déçu par son travail qui n'avait absolument pas déminé le terrain, mais au contraire camouflé les explosifs, ne l'a pas défendu. Il est singulier de constater que loin de crier haro sur le baudet, les syndicats se sont montrés très modérés. Tout juste n'ont-ils pas regretté le départ de leur interlocuteur. Superman semble bien avoir été éliminé par les bureaucrates qu'il avait sous-estimés. C'est d'ailleurs un technicien, nous dit-on, qui lui succède.


Pourquoi cette croyance en l’impunité ? Demande-t-on. En fait, comme ceux qui s’établissent sur les pentes des volcans, on connaît le risque mais on le prend.

Pourquoi ? Parce que c’est nécessaire.


L’explication est simple. C’est l’Etat qui donne l’exemple et le mauvais. Quand la haute administration vit grassement aux crochets de l’Etat. Logée nourrie, blanchie. Quand elle se sert de l’Etat pour obtenir des postes à la tête des entreprises privées, ou publiques. Quand l’Etat leur sert de parachute. Ceux qui n’ont pas le bonheur d’être fonctionnaires en sont réduits à vivre d’expédients. Donc en marge, à la limite des règlements et de la morale.


Contrairement à ce que l’on dit, il ne faut pas serrer la vis aux politiques, mais leur permettre de vivre décemment. Ceux qu’il faut modérer sont les bureaucrates.

On ne peut qu’applaudir Bruno Le Maire quand il décide de démissionner de la fonction publique pour entre en politique. Et saluer Emmanuel Macron quand il renonce à sa retraite de Président, et à son siège à vie au Conseil Constitutionnel, lui aussi rémunérateur.




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