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La force destructrice de l'image

  • Photo du rédacteur: André Touboul
    André Touboul
  • 28 févr. 2020
  • 2 min de lecture


Cela commence comme un roman de John Le Carré. Un avocat douteux, Juan Branco, une égérie vénéneuse, Alexandra de Taddeo, un prétendu artiste vraiment fou, Piotr Pavlenski, et un candidat à une érection. ( Oups ! lapsus calami, il faut lire élection)


Dans la Rome antique, le candidat était une personne pure, vêtue de lin blanc, ce que l'on appelait la probité candide. C’est dire à quel point le processus électoral repose sur une fiction, celle de la pureté absolue de ceux qui se présentent aux suffrages de leur concitoyens. C’est aussi comprendre la vulnérabilité des élus et de ceux qui prétendent à l’être. La moindre tâche sur leur toge les disqualifie.


Au prétexte de transparence, ou de moralisation tous les moyens sont utilisés dans le débat public. La compétition ne connaît aucune barrière. Les thèmes de destruction sont toujours les mêmes : l’argent et le sexe. L’affaire Griveaux ne présente aucune nouveauté à cet égard.


Seuls les instruments varient avec les moyens de l’époque où l’information circule plus vite et où l’image dicte sa loi.


En 1962, Herbert Marshall Mac Luhan sociologue et théoricien de la communication canadien, célébrant l’avènement de l’image annonçait que nous quittions la « Galaxie de Gutenberg » pour entrer dans la « Galaxie de Marconi ». C’est-à-dire que nous passions de l’écrit aux médias électrique et électronique.


On se souvient de l’image qui en 1975, illustra la réponse de Gutenberg par un bras d’honneur ; elle était destinée à prouver que la presse écrite n’était pas morte, mais, au fond, elle n’était qu'une confirmation de la suprématie de l’image sur le verbe.


La puissance de l’image. On a lu toutes sortes de frasques attribuées à des politiques de premier rang. Cela n’a, même au royaume du puritanisme américain, eu qu’un impact mesuré sur leur carrière, sauf dans le cas où il y avait des images. Trump s'est impunément vanté de "prendre en main" toutes les femmes par leur vagin, il y avait les mots, pas l'image. Clinton a risqué la destitution, non pour avoir été un mari infidèle, écart de conduite non documenté par une image, mais pour avoir commis un parjure. A l’inverse, l’image qui a disqualifié DSK, sans appel, fut celle prise dans sa prison, plus que les accusations de viol, qu’il déniait.


L’image est un coup de poing. Mais au-delà de ce qui n’est qu’une question de degré, il existe une dimension de fond.


Une image, une vidéo, cela ne se discute pas. On peut contester une accusation, l’image est sa propre preuve. Elle institue qui la regarde en un témoin à charge.


Bien pis, l’image déborde le cadre que l’on prétend lui assigner. Elle en dit toujours plus. Inconsciemment, inévitablement, l’esprit restitue l’image dans un contexte. Certes, on peut toujours avancer des explications sur l’avant et l’après, mais le plus souvent le remède est pire que le mal. Soit on passe pour un menteur, soit on paraît nier l’évidence. Car ce que l’on fait, c’est simplement opposer des mots à une image. Et dans ce cas, ce qui reste dans les esprits, c’est l’image.



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