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Le grand bond en arrière ?

  • Photo du rédacteur: André Touboul
    André Touboul
  • 31 mars 2020
  • 3 min de lecture

Du haut de ses compétences indiscutables, Pierre Lellouche, qui fut notamment Secrétaire d’Etat au commerce extérieur, déclare « La pandémie accélérera la montée en puissance de la Chine ».


Sa prédiction est essentiellement fondée sur le désintérêt des États Unis pour l’Europe, la puissance industrielle chinoise et l’importance des réserves de change de l’empire du milieu.


Il n'est pas seul à faire cette prédiction, on n'est pas obligé de le suivre, et même d'autres considérations montrent que la réalité risque fort d'être inverse.


Narendra Modi, le Premier Ministre Indien, a menacé sa population d’une régression de 20 ans, si elle ne respectait pas les consignes de confinement. Pour la Chine, la véritable épreuve de vérité commence maintenant.


De fait, Pékin doit se préparer à un grand bond en arrière. Le poids de l’industrie chinoise ne vaut que par ses exportations, sans elles, c’est un boulet. Et justement la pandémie les a mises en danger.


Pour l’Italie la nouvelle route de la soie promise par la Chine s’est révélée l’autoroute de la mort, elle n'est pas près de lui ouvrir les bras sans précaution.


La diplomatie du masque, dont on se fait, ici ou là, les gorges chaudes, est une faribole. La moindre des choses quand on a rendu un client malade est de tout faire pour lui venir en aide. Ce faisant la Chine ne fait que ménager ses débouchés, prévenir la disparition de ses clients.


Néanmoins, on ne pourra, quoi que fassent les chinois, oublier que c’est leur pays et son laxisme sanitaire qui nous a livrés en otages au virus ; et, faits plus graves, que ce n’était pas la première fois, et que les informations chinoises n’ont pas été sincères, loin le là.


Quand un fournisseur livre avec ses produits des maladies et leur ment, il perd ses clients. Parce qu’il les ruine et au moins les indispose. Souvent la désaffection va au delà du raisonnable. Telle est la loi du marché.


Ainsi, il est prévisible que les pays européens, et même l’Europe en tant que telle, vont hausser leur exigence de protection commerciale, pour limiter leur dépendance ; mais aussi mettre la Chine, en quelque sorte en quarantaine, tant que ce pays n’aura pas donné de preuves tangibles et vérifiables de son sérieux en matière de santé publique. En l’état de son régime politique, elle aura bien du mal à convaincre.


Le temps n’est plus à dire que chacun fait chez soi ce qu’il veut. La santé des Chinois est l’affaire du monde entier.


Au sortir de la crise, l’Europe, et les autres pays devront rapidement donner des preuves de vie. Ils devront démontrer que l’on ne doit pas renoncer à produire chez soi pour quelques centimes de plus. Même si le niveau de vie doit en pâtir.


En France, il sera bientôt temps de renvoyer les énarques à la niche, et de demander aux commerciaux de se calmer, pour rappeler les polytechniciens, ceux qui ont assuré pendant la période des trente glorieuses.


Les américains ne seront pas les derniers à relocaliser, le mouvement était déjà enclenché avant la pandémie.


Mais la mondialisation n’est pas morte, loin de là. En l’état d’imbrication et de parcellisation des productions essentielles, il est impossible de revenir à des protectionnismes nationaux, de type années trente. L’économie moderne a prouvé sa fluidité. Les candidats pour remplacer le fournisseur chinois ne manquent pas. L’Inde, le Vietnam, l’Indonésie... ces pays attendent leur heure ; certains travaillent déjà pour le monde, en sous-traitance pour la Chine.


Dans ce contexte, il est à prévoir que les cocoricos du pouvoir de Mr Xi risquent de se transformer en chant du cygne. Les réserves en devises de la Chine pourront un temps ralentir le déclin, mais, là aussi, ces créances sur ses clients qui vont faire fonctionner la planche à billets, comme jamais, ne vaudront plus grand chose. Le régime sera-t-il sauvé par son marché intérieur ? Cela est peu probable, car celui-ci n’existe pas encore et sans le moteur des exportations, la prospérité chinoise n’est qu’un mot sur du papier.


Sans doute en Europe, l’Allemagne, qui a bâti sa prospérité sur les ventes de machines-outils en Asie, souffrira du déclin chinois, mais quand l’économie mondiale repartira, elle sera bien avisée d’utiliser ses capacités industrielles à reconstruire une Europe solide.



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