top of page

En attendant Godot, on rêve à l’abolition des privilèges… les vrais

  • Photo du rédacteur: André Touboul
    André Touboul
  • 4 oct.
  • 5 min de lecture

ree

Sébastien Lecornu serait-il le Géo Trouvetout des finances publiques ? En fait, de sa boîte à outils qui fait penser à François Hollande tentant d’inverser les courbes, et dont les instruments sont rouillés, il ne sort que des réparations de fortune au seul renfort de rustines fiscales. Quant aux économies qu’il a annoncées, elles sont microscopiques et frisent tant la démagogie, qu’elles semblent une injure à l’intelligence des Français.


Les ambitions de réduction du déficit public sont réduites grâce à la complicité des experts de gauche en un calcul mental où 2+2 = 3… et toujours virtuoses en bidouillage des chiffres à qui on fait dire ce que l’on veut, oubliant qu’ils sont têtus, et qui, comme la réalité, se vengent à la fin du compte.


Nonobstant des concessions quantitatives sur l’effort à faire, et  des promesses anti-riches, Lecornu croit habile, pour échapper à une censure immédiate dont le PS détient la clé, de renoncer à ce qui est l’épine dorsale de la Constitution, le 49.3 qui exige une majorité pour s’opposer à un texte du Gouvernement.


Le contenu du budget, le Premier ministre s’en lave désormais les mains, il sera le résultat des amendements votés par des majorités fluctuantes selon les calculs démagogiques de partis. Il sera incohérent, et peut-être même, il ne sera pas.


Quant aux autres textes, ce sera soit l’immobilisme, soit le grand n’importe quoi. En effet, tout autant qu’en matière financière, les lois ne peuvent pas, sans être délirantes, sortir du chapeau des parlementaires sans s’appuyer sur des dossiers préparatoires sérieux. C’est la complexité de la société moderne où les interactions sont multiples, qui justifie le primat dans l’élaboration de la loi, conféré dans les Etats modernes à l’Exécutif et à son Administration. En d’autres termes il est impossible de légiférer sainement sans tenir compte des tenants et des aboutissants.


Dans la pièce de Samuel Beckett  En attendant Godot, deux clochards, Vladimir et Estragon, attendent au pied d’un arbre mort, la venue de Godot, un personnage dont on ne sait rien, ni quand il viendra ou même s’il viendra vraiment. La dernière réplique de ce drame immobile est « oui, allons y ! ». Mais où ? Personne ne le sait. L’immobilité débouche sur le n’importe où et le n’importe quoi.


Pour le règne interminable au point de devenir minable de Macron, la fin de la pièce ne verra pas la venue d’un Godot providentiel, non pas seulement parce qu’une personnalité charismatique apte à entraîner les cœurs derrière elle n’existe pas, mais surtout parce que le débat public ne porte pas sur les réels problèmes ni par conséquent sur les vraies solutions au mal français qui ne se limite pas à la question de l’immigration.


De grandes réformes structurelles sont nécessaires et urgentes, nul ne le conteste.


Chacun pressent que leur importance doit être du même ordre que celles que la France a connu en 1789, car nous sommes à la fin d’une époque commencée à la Libération et d’un régime social qui a atteint ses limites de soutenabilité.


L’évolution démographique a tué l’Etat-providence que l’on attribue au CNR qui devait être, selon la philosophie communiste qui l’animait, une étape bureaucratique vers la « disparition de l’Etat », promise par l’utopie marxiste. Le destin de la France devait être celui d’une URSS tempérée par une réelle tradition démocratique. L’omnibus du tout-Etat nous a acheminés vers le même port de la banqueroute financière que la Russie a atteint par le TGV de sa gestion totalement administrative de l’économie.


Le rapport actifs/bénéficiaires retraités s’est effondré. La santé est devenue une exigence de plus en plus coûteuse que nul ne veut assumer.


La phobie du travail s’est installée dans les esprits de par l’inconséquence d’une Gauche idéologue.


En réalité, ce n’est pas la quantité de travail qui est déterminante, mais sa qualité. Le vice interne de l’idéologie dominante est d’exiger la stabilité de l’emploi toujours mieux garantie, tout en faisant du travail un supplice voire un mal absolu.


A cette contradiction doit répondre un discours où le travail se justifie par son utilité sociale, laquelle doit être reconnue par une rémunération au mérite. Dans l’économie privée ce principe est encore en vigueur, en tout cas dans les entreprises qui se portent bien. Pour le secteur public, tout reste à faire.


Il faut prendre le problème à la racine, et dans une perspective de long terme.


La vraie révolution qui permettrait à l’Etat de faire face au bouleversement promis par l’IA, serait de ne plus engager de fonctionnaires que par des contrats à durée déterminée, reconductibles en fonction des besoins.


Seule cette politique, qui est, hélas, absente du débat médiatique, permettrait à l’Etat comme aux collectivités publiques d’adapter leurs personnels à des tâches qui vont évoluer à une vitesse jamais connue jusqu’ici.


Il n’est plus possible devant une modification radicale des modes d’administration, y compris dans les domaines de santé, police, justice et armée, d’entretenir ad vitam une masse toujours  grossissante de ce qu’il faudra bien qualifier d’inutile, quand ce ne c’est pas nuisible par sa force de résistance aux changements nécessaires.


Cette mesure simple aurait, en outre, un effet immédiat sur l’impasse dans laquelle se trouvent les finances publiques. En effet, en ne raisonnant plus en termes de postes mais de missions, l’Etat deviendra frugal, car il devra justifier la pertinence de chaque embauche dans sa nature et sa durée. Aujourd’hui, on pourvoit à des postes dont la création, parfois lointaine ou dont les motifs sont obscurs, n’est jamais remise en question. Telle est la raison de la sur-administration qui elle-même produit de plus en plus de normes. La France est à cet égard dans une situation où l’Administration est devenue assez massive et occupée d’elle-même pour n’avoir plus besoin d’un pays à administrer.


Certes l’Etat n’est pas une entreprise, encore qu’il existe désormais des entreprises à mission, mais il est soumis aux mêmes règles de gestion qui lui sont imposées par la finitude de ses ressources.


La masse salariale de l’Etat et des collectivités territoriales était en 2021 de 357 milliards d’euros, avec un montant équivalent pour les retraites. C’est donc un montant de plus de 700 milliards qu’il faut trouver chaque année.  Les recettes fiscales sont de l’ordre de 600 millards, d’où un déficit structurel de 100 milliards, c’est-à-dire une grande partie des 168 milliards du déficit public. Aucun organisme ne peut survivre à un tel déséquilibre.


Porter l’attention sur la gestion par la puissance publique de ses personnels est une urgence soigneusement ignorée de notre élite qui a l’Etat pour totem et la fonction publique pour tabou.


Tant qu’il en sera ainsi, les contribuables ne seront pas rassurés sur la destination de leur argent, et ne pourront être d’accord avec quelque effort qu’on leur demande.


Si les politiques avaient le courage de procéder à l’abolition du privilège ahurissant que constitue la garantie d’une rémunération à vie par la statut de la fonction publique, absurdité économique qui veut que pour chaque fonctionnaire engagé, l’Etat crée une dette de soixante années de revenus, nul doute que les Français qui aujourd’hui renâclent accepteraient de bon cœur beaucoup de ce que leur Gouvernement, enfin soucieux de l’égalité entre les citoyens leur demanderait.

 
 
 

Commentaires


bottom of page