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Marine Le Pen et les Grands Corps, le pacte faustien




Quand elle réplique au discours de politique générale de Gabriel Attal, Marine Le Pen, entre autres considérations, déclare qu’il convient de rétablir les Grands Corps pour que l’Administration obéisse au politique.


Le contresens est extrêmement signifiant.  C’est, en effet, un non sens de  remettre en selle la Haute Administration qui a « fait la peau » aux représentants  élus du peuple, parvenant à les écarter sur le thème sans cesse ressassé du « tous  pourris ».


Mais sa promesse est aussi pleine de sens sous jacents. D’abord, s’appuyer sur une Haute Administration aux ordres est dans l’ADN des régimes autoritaires. De même, la promesse de rompre avec la corruption réputée apanage des démocraties permissives est un thème récurrent des aspirants dictateurs.


Fort heureusement, il ne suffit pas dans la France d’aujourd’hui de gagner la présidentielle pour transformer le régime démocratique en une autocratie. Il reste encore assez de vigueur aux corps intermédiaires et aux élus locaux pour interdire une telle dérive.


Ce que laisse entendre Marine  Le Pen est qu’elle a déjà un accord avec la haute fonction publique, et que ce pacte dont elle annonce la contrepartie lui permettra de gagner, puis de gouverner.


On sait que l’élite d’Etat est aux abois. Désorientée, elle se sent maltraitée et se trouve prête à voler au secours de la victoire qu’elle présent en la personne de Marine Le Pen.


L’analyse est tentante pour ces gâtés de la méritocratie du service public. La candidate présente des points communs avec François Mitterrand. Comme lui, elle s’est présentée plusieurs fois et fait partie du paysage familier des Français. Comme lui, elle dispose du seul parti sérieux, dévoué à sa cause. Comme lui elle fait preuve d’une patiente conversion à une posture politique bien éloignée de celle de ses origines.


Par degrés, elle est passée du plafond de verre au « pourquoi pas ? ».


En défilant contre l’antisémitisme, alors que  Macron se défilait, elle a fait ce que les joueurs de bowling appellent un strike. Par ce coup gagnant, elle a enfoncé la dernière défense qui la rendait infréquentable.


Elle peut aussi compter sur les excès de Zemmour pour justifier l’opinion de ceux qui la jugent modérée. .


Un autre argument de ceux qui se sont fait une raison de sa victoire sera l’exemple italien, dans lequel Georgia Melloni a, dès son arrivée au Quirinal, révisé ses positions anti-européennes et hostiles aaux immigrés. Ce que l’on appelle le réalisme imposé par les faits.


La dernière raison de soutenir Marine Le Pen, l’élite d’Etat la trouvera en elle-même. Rétablie dans ses prérogatives elles serait un allié indispensable pour mettre au pas un peuple frondeur et indiscipliné, imposant tout ce que Macron n’a pu ou voulu faire.


Sur le fond, l’impuissance de l’Etat face à l’immigration, à l’effondrement du système de santé, de l’éducation nationale, et aux stupidités des politiques de décroissance, apparait aux 5000 qui constituent l’élite d’Etat, comme aux autres Français. Ils n’espèrent pas vraiment que Marine Le Pen détient la solution de ces problèmes, mais peuvent très facilement se convaincre que c’est pour eux le seul moyen de prolonger leur mainmise sur l’Etat et ses richesses.


Le pacte qui semble conclu entre Marine  Le Pen et les Grands Corps ressemble néanmoins à celui du docteur Faust qui vend son âme contre la promesse d’un rajeunissement. Parce qu’il ne faut pas s’y tromper, le Rassemblement National ne partage en rien les convictions politiques des Grands commis de l’Etat qui sont et restent plus à gauche qu’il n’est raisonnable de l’être dans le monde d’aujourd’hui.

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