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Quelles nouvelles du Monde libre ?




On enseigne qu’à la Renaissance les meurtrières des châteaux-forts ont fait place aux larges fenêtres des belles demeures et châteaux de la Loire. Mais ce fut aussi l’époque atroce des guerres de religion et de conquêtes territoriales. Nostradamus, mi poète, mi prophète des malheurs d’un 16ème siècle livré aux désordres, promettait dans ses quatrins catastrophes sur cataclysmes. Il serait passionné par notre époque qui ressemble furieusement à la sienne. On y constate des ouvertures techniques stupéfiantes, mais aussi le retour du tragique.


Alors que le 20ème siècle se terminait par l’illusion de la « fin de l’histoire », puisque la dictature bureaucratique soviétique s’était effondrée, et qu’une seule civilisation, celle du Monde libre, semblait devoir s’imposer pour toujours, le troisième millénaire aura commencé dans le « choc des civilisations ». Francis Fukuyama avait donc tort et Samuel Huntington raison.


Pour Fukuyama, qui aurait emprunté cette vision à Hegel, l'Histoire s’achevait le jour où un consensus universel sur la démocratie mettait un point final aux conflits idéologiques. Telle était, selon lui, la conséquence du naufrage de l’utopie communiste dans les années 90.


La thèse centrale du Choc des civilisations de Huntington, quant à elle, reposait sur la description d'un monde divisé en huit civilisations  : occidentale, slave-orthodoxe, islamique, africaine, hindoue, confucéenne, japonaise et latino-américaine. Une civilisation est, selon cette thèse publiée en 1996, « le mode le plus élevé de regroupement et le niveau le plus haut d’identité culturelle dont les humains ont besoin pour se distinguer ». L’affrontement idéologique était, pour Huntington, inévitable.


Sans doute, la civilisation occidentale a paru imposer l’essentiel de ses valeurs démocratiques, c’est-à-dire égalitaire en politique et libérale en économie à l’ensemble du monde libéré, mais le cours des événements de ce premier quart de siècle a montré que les affrontements historiques étaient loin d’être à jamais révolus.


L’Islam, d’abord, a manifesté son opposition, voire son incompatibilité avec l’Occident. Il en est résulté des conflits armés au Moyen Orient et bientôt intérieurs à l’Occident rendu vulnérable par son ouverture à une mondialisation dont on doit, tout de même, rappeler qu’elle a sorti de la misère plus d’un milliard d’humains. La civilisation slave-orthodoxe, qui aurait pu se rapprocher de l’Occident, s’en est séparée, s’en déclarant menacée, sans que l’on sache vraiment pourquoi. La Chine, sous couvert d’un Communisme à la chinoise compatible avec le commerce libéral, s’est, en réalité, enracinée dans un système de mandarinat administratif draconien où la liberté individuelle n’a aucune place.


L’Afrique et l’Amérique latine sont, chacune de leur côté, en voie de rejet du système occidental, à des degrés divers, mais toujours n’affirment leur identité que contre l’Occident, à leurs yeux coupable de ne pas leur avoir apporté la prospérité économique qui est la sienne.


Seuls l’Inde et le Japon semblent arrimés aux valeurs démocratiques.


Par la conquête commerciale pour la Chine, ou la guerre pour la Russie les règles d’une mondialisation heureuse prônées par l’Occident  dans une harmonie assurée par le droit international, ont été mises en échec.


L’Etat de droit suppose un consensus sur l’essentiel. Il n’existe plus au plan international. C’est aujourd’hui le chaos, et le fracas des armes qui régissent les relations entre les nations.


Sans peine, un nouveau Nostradamus pourrait prophétiser les catastrophes et sans risque d’être démenti annoncer des cataclysmes. Beaucoup ne s’en privent pas.


L’extinction de l’espèce humaine est désormais une opinion, voire une conviction, chez des activistes d’Extinction Rebellion, et autres prophètes de malheur. Ceux-ci peuvent sans trop d’imagination exciper de la suffocation du fait du dérèglement climatique et de l’asphyxie par des continents de déchets.


La troisième guerre mondiale est une option de plus en plus présente dans les discours des gouvernants de par la planète, qui sont de moins en moins diplomatiques et de plus en plus polémiques.


Face aux nations réfractaires à ses valeurs qu’elles déclarent impérialistes, la civilisation occidentale, minée de l’intérieur, semble vouée au déclin ou à l’effondrement. L’idée de progrès humain consubstantielle à la démocratie parait désormais saugrenue.


Pourtant, l’espèce humaine n’a jamais disposé de moyens techniques aussi performants et jamais leur évolution n’a été aussi rapide. C’est d’ailleurs cette vitesse exponentielle d’accroissement des connaissances qui désoriente les populations et provoque des inquiétudes et incompréhensions. Il est tentant de suggérer que l’intelligence artificielle, l’IA a pris le pas sur l’intelligence humaine, le QI.


Si l’on veut que le nouvel ordre mondial soit autre chose qu’un désordre soumis à la loi de la jungle, il faut que la civilisation occidentale, renonce aux délices de la repentance, et assume sa mission unificatrice de l’espèce humaine autour des valeurs de la démocratie.


Cette fonction découle, non de sa supériorité, mais de ses fondements universalistes. La responsabilité de l’Occident n’est pas celle des ses crimes passés contre ces valeurs qu’elle a inventées, mais du fait qu’elles sont désormais absolument siennes, et qu’elles seules portent une possibilité d’organisation mondiale où le droit prime la force.


La démission de l’Occident serait celle de l’espèce humaine, car la planète est désormais trop petite pour être le théâtre de conflits entre des nations concurrentes qui ne s’unissent qu’en fonction d’intérêts conjoncturels, telles la Chine, la Russie et l’Iran, associés dans le crime, mais dont on peut prédire qu’elles finiront par se combattre.


Pour assumer sa tâche, l’Occident doit d’abord être intransigeant et ne pas trembler, à l’intérieur comme en politique internationale.


La faiblesse domestique, c’est de « macroner » par crainte d’indisposer une prétendue sensibilité musulmane, alors que c’est là livrer les Musulmans de France aux dictats des fondamentalistes qui projettent d’instaurer la Charia aux lieu et place de la loi républicaine. Cet Islam politique vise à fracturer la société civile en en séparant les Musulmans sommés de ne pas être de mauvais croyants corrompus par la société des mécréants. L’objectif est de parvenir, non à une prise de pouvoir, mais à une guerre civile, nécessairement tragique pour les minoritaires. Cette stratégie du martyr est celle du 7 octobre, et de ses suites à Gaza. Elle fonctionne à merveille a en croire nos médias qui rêvent encore d’un monde de Bisounours.


Dans cet univers devenu celui des carnivores, si l’Occident ne veut pas être le troupeau d’herbivores qui, résigné, abandonne quelques proies aux dictateurs affamés car telle est leur nature, il doit montrer les dents. Qu’on le veuille ou non, il est, à terme, la seule espérance d’une Humanité en paix. Sa faute serait de décevoir le Sud global, nouveau nom des Non-alignés de jadis. Pour cela, il lui faut, non pas s’aplatir dans la repentance, mais être lui-même. Il doit assumer que les poids et mesures ne sont pas les mêmes vis-à-vis des démocraties et des autocraties. Il doit donc défendre le Monde libre.


Les nations d’Afrique et d’Amérique latine notamment sont séduites par les régimes tyranniques présumés forts, et elles sont déçues par l’attitude de contrition et la pleutrerie de l’Occident. Ces hésitants ont quelques motifs de constater que les faiblesses des démocraties font la force de leurs ennemis.


Le présent semble donner raison à Huntington et à sa vision du « clash » des civilisations, mais, de fait, ce qui divise le Monde d’aujourd’hui est essentiellement une opposition entre les démocraties et les régimes autoritaires, théocratiques ou tyranniques. Seule la civilisation islamique déclare la loi d’Allah radicalement incompatible avec celle impie de la démocratie. Les autres nations se déterminent en fonction de leurs intérêts, et elles le font en prévision de l’effondrement des démocraties sous les coups de boutoir de l’Islamisme conquérant. Il appartient, ainsi, à l’Occident de se déterminer. S’il renonce à défendre le Monde libre comme le veulent les isolationnistes nord-américains, tout sera perdu, car s’il ne s’occupe pas des régimes autoritaires, ceux-ci s’occuperont de lui..


En vérité, c’est Fukuyama qui montre la seule voie possible pour échapper à une fin de l’histoire qui ne soit pas le funeste contraire d’un happy end. Eu égard aux capacités de destruction entre les mains des Etats, l’échec du Monde libre, sera l’assurance d’un suicide collectif.







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