Une démocratie méritocratique en trompe l’œil

La France serait, dit-on, une méritocratie, c’est peut être vrai, mais alors une fausse.

Depuis Bourdieu on a critiqué les insuffisances du système de selection qui conduit à recruter les promus dans le même milieu social. On a souligné le caractère discutable des codes, et l’orientation de l’enseignement ressemblant plus à un formatage qu’à une aide à l'éclosion des talents.

Ces critiques sont fondées, mais assez communes à bien des élites. Il est cependant un phénomène plus grave, typiquement français.

Le gouvernement par les meilleurs n’est pas réel quand ce sont les promus d’une seule catégorie qui monopolisent les postes et en particulier usurpent des pouvoirs que la démocratie exige de voir assurer par d’autres. Les décisions politiques en particulier doivent être prises par des élus car eux seuls sont responsables devant l'électeur.

On ne pourrait que se féliciter que ceux-ci soient choisis parmi les meilleurs, mais là où le bât blesse, c'est qu' en France, ce ne sont pas les élus qui décident, mais la haute administration.

La promotion au mérite est une bien belle chose, mais elle ne remplace pas le contrôle démocratique, c’est à dire la responsabilité face aux urnes.

Quand le système décisionnel écarte le citoyen de tout pouvoir de sanction des responsables réels, il n’est pas une démocratie méritocratique, mais une tyrannie d’usurpateurs.

Quand le vote est privé de tout effet, l’abstention devient majoritaire puisque les choix des électeurs n’ont aucune conséquence, et la démocratie devient un simulacre.

La démocratie méritocratique effective dépend du mode de sélection initiale, mais aussi du contrôle continu. Or la méritocratie à la française a réussi à éluder cet examen citoyen. Ainsi le régime politique actuel de la France est certes une méritocratie, mais une démocratie en trompe l’œil.

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